La mission, qui s’est déroulée du 7 au 12 mai 2025, avait pour objectif la réception des ouvrages du projet Karang Poste. À notre arrivée au Sénégal, l’équipe (Michel Fontanel et moi-même) a été accueillie à l’aéroport par Ben Ndiaye, responsable de la coopération à la mairie de Karang. Après 3 heures 30 de trajet, nous rejoignons Karang Poste, une localité de la région de Fatick, au sud du pays. Créée en 1906 et érigée en commune en 2008, Karang est, comme son nom l’indique, un poste frontière avec la république sœur de Gambie. Sa position stratégique fait de la cité le poumon économique de la région du Niombato et du Siné-Saloum (parc national).
La commune de Karang Poste, qui compte 2 500 ménages, est dépourvue de système d’assainissement collectif (réseau) et d’une couverture correcte en assainissement privé (concessions) respectant les normes nationales. La nappe, qui affleure par endroits, se retrouve polluée dans certains quartiers, lesquels disposent de sources d’eau variées (puits, céanes). Cela se traduit par une recrudescence des maladies diarrhéiques.
La première étape de ce projet a consisté en une étude diagnostique prospective sur les pratiques d’hygiène et d’assainissement, visant à estimer les besoins réels de la population et à identifier les besoins d’accompagnement des structures publiques et privées de la ville.
La première cible du projet est constituée des écoles publiques situées dans cinq quartiers, avec un volet assainissement (construction de latrines), un volet eau (réhabilitation d’un puits et réalisation de deux mini-forages), ainsi qu’un volet formation à l’hygiène et à l’entretien des infrastructures. La deuxième cible regroupe des habitants du quartier de Karang Bah, avec la construction de latrines (une cabine) dans 20 concessions du type TMC double fosse, selon les normes de l’OMS, et la mise en place d’une formation à l’hygiène et à la vidange des fosses. La mairie, le représentant de l’association Alamouta, l’entreprise Salam Construction, ainsi que HSF ont été les principaux acteurs tout au long de la réalisation du projet.
Déroulement de la mission
Dès le lendemain, nous étions à pied d’œuvre de bonne heure. Une semaine était prévue pour visiter et contrôler les différents chantiers répartis sur les 20,88 km² que couvre la ville. Cela exigeait une organisation rigoureuse, heureusement, nous étions véhiculés. Après un état des lieux des latrines publiques, en présence des différents acteurs du projet, nous avons dû déplorer de nombreuses malfaçons et des finitions bâclées. J’ai exprimé avec véhémence mon mécontentement auprès des acteurs locaux. À la suite de ce recadrage, nous avons décidé de dresser la liste de tous les travaux à reprendre dans les plus brefs délais.
La visite s’est poursuivie dans le quartier de Karang Socé, où des latrines privées ont été construites dans 20 concessions. Bien que ce quartier soit le plus excentré (à 2 km du centre-ville), c’est aussi le plus agréable, baigné d’une certaine quiétude. De magnifiques arbres y créent des zones d’ombre qui rendent les déplacements moins éprouvants sous cette chaleur torride.
La priorité a été donnée à la visite de la latrine pilote, construite fin 2024, avec l’accord du propriétaire, que nous avons félicité pour l’état impeccable de son édicule. Chaque latrine a été inspectée en présence des familles et de l’entreprise. Tous les défauts ont été relevés, et les reprises nécessaires listées. Le bilan est globalement plus satisfaisant que celui des latrines publiques, mais cette situation reste inadmissible. Nous avons exigé que tous les travaux soient terminés dans un délai d’une semaine, soit avant la fin de notre mission. Une réunion improvisée s’est tenue chez le chef de quartier avec les responsables des familles. Bien que nous ne puissions pas entériner la réception, ce qui empêche les habitants d’utiliser les latrines, nous avons reçu de nombreux témoignages de gratitude de la population.
Malgré ce premier bilan mitigé, nous avons surtout perçu un manque de communication et une certaine défiance entre les acteurs locaux. Nous les avons recadrés et avons pris l’initiative d’organiser les travaux de réfection pendant notre présence, afin de pouvoir réceptionner un maximum d’édicules.
Volet Eau du projet
Les installations fonctionnent correctement. Le puits à pompage solaire de l’école de Kassoumay est opérationnel depuis octobre 2024. Le mini-forage avec pompage solaire de l’école Escale 1 est très sollicité par les entreprises de maçonnerie, qui y construisent une nouvelle classe et un mur d’enceinte pour sécuriser le groupe scolaire. Du côté du quartier de Santhié Sady, le deuxième mini-forage est également en service. Sur l’ensemble des installations, quelques travaux de finition sont en cours, notamment le branchement en eau des latrines par réseau dans chaque école.
Nous avons profité de notre présence pour organiser le branchement des latrines de l’école de Kassoumay (le plus grand réseau). Une journée et demie a été nécessaire pour le montage et les essais de débit, mais nous avons la satisfaction de voir ce travail achevé, et de surcroît, réalisé dans les règles de l’art.
Analyse de l’eau et sensibilisation
Un des temps forts de cette mission a été la venue de Mme Sarr, responsable du laboratoire de l’université de Ziguinchor, avec qui j’avais déjà travaillé sur le projet Diaroumé. Elle a effectué ce long trajet pour prélever des échantillons d’eau aux différents points (puits et mini-forages). En présence des enseignants, Mme Sarr a évoqué les problématiques liées à la qualité de l’eau et les procédures nécessaires pour en maintenir la potabilité (notamment la chloration). Cette intervention a été très appréciée. À noter que nous avions donné comme consigne aux enseignants d’interdire la consommation d’eau par les élèves avant d’obtenir les résultats des analyses ; un cadenas a d’ailleurs été installé sur les robinets pour éviter tout risque.
Grâce à une pression constante, un suivi quotidien des chantiers, et une coordination rigoureuse des travaux tout au long de la semaine, nous avons obtenu des résultats probants, notamment sur les latrines privées. À ce jour, tous les défauts et finitions des latrines publiques ont également été corrigés. Une réception officielle, organisée par M. Diop (maire de Karang) en présence des notables et de la population, est venue entériner la fin des travaux.
En conclusion de cette mission, je reste très dubitatif quant à la capacité de la commune à relever les défis à venir (alimentation en eau, gestion des déchets, gestion des eaux grises et pluviales, gestion des latrines publiques dans les lieux stratégiques comme la gare routière, le marché ou la douane). Le partenariat avec HSF représentait une opportunité unique de développer un service de maintenance communal (au moins deux personnes), à travers un suivi rigoureux des différents volets du projet, et d’acquérir les bases nécessaires à la gestion des édicules et des infrastructures d’eau.
Le point positif est que le comité des écoles semble en mesure de gérer les infrastructures et de poursuivre la diffusion des règles d’hygiène auprès des élèves. Quant aux latrines privées, vu l’excellent comportement et l’implication des familles bénéficiaires, je ne doute pas de la pérennité des installations.
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